" M. le préfet
vous a communiqué, dans son ordre du jour du 5 octobre
1961, les mesures qu'il avait prises pour neutraliser le terrorisme
algérien et accroître la protection des personnels
de police.
La présente circulaire a pour objet de préciser
les modalités d'application de ces mesures.
1. Couvre-feu.
Le couvre-feu est applicable pour les Français musulmans
algériens de 20h 30 à 5h 30 du matin. Ceux qui
seront interpellés pendant ces heures sur la voie publique
devront être conduits au poste, pour être dirigés
sur le centre d'identification de Vincennes.
Toutefois, ceux d'entre eux qui seraient obligés, pour
des raisons professionnelles, de se trouver dehors pendant la
durée du couvre-feu, soit qu'ils se rendent sur leur
lieu de travail ou qu'ils en reviennent, doivent représenter
une attestation de leur employeur visée par le service
d'assistance technique aux Français musulmans algériens.
Ce visa est valable un mois. A l'issue de ce délai, il
doit être renouvelé. Il reste bien entendu que
ce laissez-passer ne devra pas être considéré
comme valable si le Français musulman algérien
qui le présente est manifestement soit hors de l'itinéraire
qu'il doit normalement suivre pour aller ou revenir de son travail
à son domicile, soit dans un temps où sa présence
sur la voie publique ne peut s'expliquer par l'horaire de son
travail.
2. Circulation des Français musulmans algériens
en voiture.
Les mesures exposées ci-dessous sont applicables aux
Français musulmans algériens circulant en voiture
en tout temps.
Les Français musulmans algériens propriétaires,
conducteurs ou passagers des véhicules automobiles interpellés
sur la voie publique, de jour comme de nuit, seront conduits
dans les postes de police. Ils seront mis à la disposition
des commissaires de police avec les véhicules qu'ils
occupaient qui seront pris en consigne.
La stricte application de cette réglementation constituerait
pour certains Français musulmans algériens une
gêne particulière dans l'exercice de leur profession.
Pour pallier ces inconvénients, des laissez-passer seront
remis aux intéressés. La validité de ce
titre est fixée à un mois.
Toutefois, les véhicules dont les conducteurs présenteront
un laissez- passer devront néanmoins faire l'objet sur
place d'une vérification de leur utilisation. Les occupants
français musulmans algériens, autres que le conducteur
titulaire du laissez-passer, devront être interpellés,
conduits au poste et mis à la disposition du commissaire
de police.
Il convient de préciser que ces instructions ne sont
valables qu'autant que l'affaire ne se présente pas au
principal comme devant être traitée par procès-verbal.
Dans ce cas, le commissaire de police de quartier ou de circonscription
de banlieue est saisi conformément aux règles
habituelles et il est bien évident alors que la production
du laissez-passer ne doit pas empêcher de retenir le véhicule
et de mettre les Français musulmans algériens
qui l'occupent, y compris le titulaire du laissez-passer, à
la disposition du commissaire de police.
Je rappelle pour terminer que l'ensemble de ces instructions
(couvre-feu et circulation en automobile) ne sont pas applicables
:
- aux élus français musulmans d'Algérie,
- aux hauts fonctionnaires sur présentation de leur carte
professionnelle (Conseil d'Etat, Cour des comptes, Corps préfectoral,
administrateurs civils des ministères, etc.),
- aux agents de la RATP sur présentation de leur carte
de service,
- aux facteurs en tenue d'uniforme,
- aux personnels de l'Assistance publique sur présentation
de leur carte professionnelle,
- aux Marocains et Tunisiens sous réserve de la vérification
de leur
titre de nationalité,
- aux étudiants français musulmans d'Algérie
sur présentation de
leur carte d'étudiant et après contrôle
de leur activité. "